"Le moulin-pendant de Villenoy (Seine-et-Marne): exemple de transition entre la meunerie artisanale et la minoterie moderne", par O. Bauchet et S. Lepareux-Couturier, Revue archéologique d'Île-de-France, n°3, 2010, p. 263-285.

Les auteurs présentent les résultats d'un diagnostic archéologique effectué en 2008, sur la rive droite de la Marne, à Villenoy, en aval du barrage de Meaux, en face du débouché du canal Cornillon. Cette étudemagnifiquement illustrée montre les dernières phases de modernisation des moulins de rivière avant que la technologie moderne ne fasse préférer d'autres forces motrices.

La construction d'un premier moulin, sur pilotis, est envisagée en pleine période révolutionnaire: après enquête des ingénieurs des Ponts et Chaussées et l'avis favorable du Directoire de Meaux, un arrêté départemental autorise en décembre 1791 la construction de deux moulins à la tête de l'île Picart. Des difficultés financières conduisirent à des cessions successives et entravèrent les travaux de construction. Le projet se réduisit finalement à un seul moulin, du type "moulin-pendant" déjà usités ailleurs dont la particularité était d'être pourvu d'une roue mobile suspendue sous la salle de mouture et pouvant suivre les fluctuations de niveau de l'eau tout en ayant une ossature bien ancrée dans le lit de la rivière. A Villenoy le modèle construit fonctionnait selon le système d'entraînement du double harnais: le grand rouet fixé à l'une des jantes de la roue entraînait une grosse lanterne munie d'un arbre debout qui faisait tourn er un hérisson (rouet muni de dents droites à sa périphérie qui s'engrenait sur une petite lanterne faisant elle-même tourner la meule supérieure. La roue à 24 aubes mesurait 4 mètres de diamètre pour une largeur de 3 mètres; les meules avaient un diamètre de 2 m avec des épaisseurs de 20 cm pour la tournante et 29 pour la gisante. Des digues permettaient d'entretenir un débit d'eau suffisant à la fois pour le moulin et pour la navigation quoique celle-ci se fît principalement par le canal Cornillon. En outre un moulin-bateau appartenant à Monsieur Blot était situé en face, côté rive gauche en amont du canal, il sera supprimé quelques années plus tard. En 1835 le moulin-pendant avait été fortement endommagé par un incendie et un deuxième le ravagea totalement en 1839. Les vestiges de ce premier moulin sont visibles dans le lit de la rivière en période d'étiage, une digue, sous forme d'une ligne de pieux avec blocage en pierres sèches. Ce sont les seul témoins archéologiques.

Un deuxième moulin, maçonné, est aussitôt envisagé pour le remplacer, avec une roue à aubes classique de 5,70 m de diamètre et 5,20 m de largeur, faisant tourner 6 paires de meules. Les travaux furent terminés en 1840 et en 1852 H. Roland, le propriétaire vendit tous ses biens, le molulin revenant à Auguste Pommier, dont il porta le nom, jusqu'en 1910. Entre temps lezs six paires de meules furent remplacées par six paires de cylindres et un molteur auxiliaire à vapeur. En 1911 le moulin, devenu propriété de M. Guiot, fut transformé en blanchisserie qui fonctionna jusaqu'en 1920; les bâtiments restaient debout en 1934, mais étaient devenus des ruines en 1961, sur lesquelles fut édifié un pylone électrique en 1971. Les observation archéologiques ont montré encore d'importaangtes élévations encore visibles, notammentg les deux larges piles entre lesquelles tournait la roue pendante et trois autres murs établis sur les berges. L'en semble formait un bâtiment de 17,80 m de longueur (est-ouest) sur 14,50 m de largeur (nord-sud). A l'intérieur de celui-ci a été mise en évidence une structure circulaire imposante en maçonnerie de 4 m de diamètre de diamètre, 80 cm d'épaisseur et 1,80 m d'élévation en moellons der meulière et pierres de taille. Elle servait probablement à supporter les six paires de meules. A l'angle sud-est du bâtiment a été mise au jour une latrine. Lors de l'opération de fouille partielle et démontage, dix éléments de meules (carreaux) ont été découverts en remploi dans les murs de la latrine et sur le niveau de sol, provenant de trois meules distinctes, provenant probablement de La Ferté-sous-Jouarre.

P. Charon